La Ville sans vent - tome 2 - Éléonore Devillepoix

20/4/2021
Fantasy
Illustration : Guillaume Morellec

Contexte 

Condamnée à mort pour le meurtre du Basiléus, Arka réussit à s’enfuir pour la forêt des Amazones. Alcandre, à force de machinations, est parvenu à prendre le contrôle d’Hyperborée pour le compte des Thémicyriens et une ère funeste s’annonce pour la ville. Mais tout ne va pas se dérouler comme le maître des lémures le souhaitait. Lycurgue, autrefois à la tête de Thémicyra n’est plus que l’ombre de lui-même et son bras droit, loin d’avoir ses capacités, compte bien prendre le pouvoir.

En ce début de deuxième tome, nous retrouvons nos personnages principaux tous séparés, Arka dans la forêt des Amazones, Lastyanax parti à sa recherche dans les monts Riphée, Pyrrha dans la ville d’Hyperborée tentant d’échapper aux soldats qui enferment tous les mages, Pétrocle retenu en otage dans la prison .

En dépit de la situation chaotique de la ville, le récit démarre plutôt lentement. Le prologue nous ouvre les yeux sur les origines et motivations d’Alcandre, l’antagoniste de cette histoire. C’est nécessaire et très crédible pour enfin cerner le personnage qui reste très mystérieux tout au long du premier tome.

Plusieurs semaines vont s’écouler pendant lesquelles nos personnages vont mener leurs propres combats chacun de leur côté avant de finalement se retrouver pour le final. C’est l’occasion de vraiment faire connaissance avec eux et de leur découvrir des mérites jusqu’ici insoupçonnés.

Notre avis

May : J’ai trouvé ce livre résolument féministe. Il dénonce l'entre-soi, la misogynie de la société d’Hyperborée, autant que la misandrie notamment à travers les Amazones qui sont tombées dans l'écueil du rejet des hommes, allant jusqu’à assassiner leurs enfants de sexe masculin.

Tine : Autant le féminisme est pataugeant et peu convaincant dans le premier tome, autant il prend ici une dimension nouvelle. Avec le recul, sans doute l’essai maladroit du premier tome n’en était pas un. Il configurait uniquement les prémices du véritable changement, à la lueur des combats vains que le féminisme doit mener pour arracher finalement des victoires. La scène de harcèlement de rue qui vise Arka est tout particulièrement réaliste. Les commentaires grivois des soldats la font se sentir sale sans raison, puisque c’est eux qui sont en faute. On peut citer aussi celle où Pyrrha empêche Lastyanax de réagir face au même type de commentaire. Il est révolté, à raison, mais elle choisit de les ignorer. 

May : Tous les personnages font l’objet d’une légère évolution qu’elle soit positive ou négative. Comme le récit se déroule sur un laps de temps court, je trouve cela tout à fait plausible. Mention spéciale pour le personnage de Pyrrha bien plus agréable dans ce tome. Comme je le disais dans l’article sur le premier tome, c’est une pionnière. Elle est la première femme à devenir mage et à se présenter à des élections. Elle est talentueuse et cumule bien des atouts tels que la beauté et l’intelligence mais ceux-ci sont compensés par un caractère orgueilleux et obstiné. Le personnage de Lastyanax atteint son potentiel et devient bien plus attachant. Il se remet en question et se démène pour ceux qu'il aime, même si ses efforts ne sont pas toujours récompensés.

Tine : Ayant lu le tome 2 un certain temps après le tome 1, j’ai été agréablement surprise à ce sujet. J’ai retrouvé les personnages hyperboréens tels que je les avais laissés, mais je les ai vus évoluer, avec leurs qualités et leurs défauts. Certaines frustrations ont disparu mais ont laissé la place à de nouvelles car après tout, personne n’est parfait. Je pense que c’est une des forces de ces deux romans : aucun personnage n’est idéal pour plaire aux lecteurs, ce qui les rend d’autant plus attachants.

May : A l'inverse, Arka n'évolue que très peu, mais elle est toujours autant attachante. On devinait dans le premier tome que son passé était difficile mais on l’avait peu vu interagir avec d’autres Amazones, c’est maintenant chose faite, mais elle lutte pour trouver sa place. Pour les Hyperboréens, elle est une amazone criminelle et pour les amazones, c’est une étrangère qui n’appartient plus à la communauté. En dépit de tous les défauts de ce peuple, Arka s’y sent plus chez elle qu’à Hyperborée. On découvre leur mode de vie, leurs règles rudes, cruelles et violentes. On est loin d’un havre de paix pour femmes. Mais je laisse cela à l’appréciation de chacun.

Tine : Il n’y a pas forcément plus de personnages dans le deuxième tome que dans le premier, mais ce ne sont plus les mêmes. Les élèves et les mages disparaissent pour laisser la place aux amazones et aux Thémicyriens. Une autre ambiance, donc, mais aussi la découverte d’autres modes de vie et d’autres cultures. Au final, on se retrouve devant une vision de notre société avec le vernis brillant à la surface qui cache une vérité en fait peu reluisante. J’ai aimé le fait qu’aucune société n’était présentée comme le modèle parfait et qu’une fois le roman fini, tout reste encore à construire.

May : En ce qui concerne l’aspect magique du récit, je déplore qu’il y en ait si peu dans ce dyptique. Cependant lorsqu’il y en a, elle est savamment employée. La malédiction est un concept bien exploité et intelligemment mené tout au long du livre. Les règles sont claires et je n'ai pas trouvé d'incohérences. L’autrice a bien construit son univers et les règles qui le régissent, chapeau !

Tine : C’était déjà mon regret dans le premier tome : les mages nous sont présentés comme puissants, mais de la magie, nous en voyons en fait à peine. Par contre, quand elle pointe le bout de son nez, c’est assez jubilatoire ! Et il n’y a aucune incohérence dans les intrications de la malédiction, qui nous tient en haleine jusqu’au bout.

May : Le point noir de ce dénouement est l’une des motivations principales de l’antagoniste, à savoir l’immortalité… ça fait un peu réchauffé. Comment dire...oui c’est un motif légitime et crédible mais il a tellement été vu et revu. Dommage !

Tine : Pour ma part, cela ne m’a pas trop dérangé, mais sans doute parce que je n’ai pas très bien saisi ses motivations pour être immortel. Quand on voit l’état dans lequel vivait le Basileus dans le premier tome, l’immortalité ne semblait pas vraiment une vie de jeunesse et de santé éternelle mais plus un lent dépérissement. Après réflexion, je me dis que je me suis laissée emporter par l’histoire sans jamais vraiment comprendre le but de l’antagoniste, ce qu’il souhaite atteindre me semblant peu enviable.

En conclusion

May : Je recommande chaudement cette courte série à quiconque serait d’humeur à lire un récit de fantasy avec de jeunes protagonistes, de l’action, de l’humour et des moments d’émotion bien dosés sur fond de militantisme !

Tine : Les tortues m’ont un peu manquées dans ce tome ! J’aurai aimé en savoir un peu plus sur le Nabot aussi (la demi-licorne d’Arka). Mais au final, ce sont des détails. C’était un bon deuxième tome, qui a su mener les intrigues à leur bout sans laisser d’explications de côté. Une très bonne lecture !

May

J'ai découvert la littérature de l'imaginaire enfant en lisant des mangas (Full Metal Alchemist, Claymore, Fruit Basket, Naruto, etc.) qui me permettaient de m’évader. Puis une camarade de classe m'a un jour prêté la trilogie du Dernier souffle de Fiona MacIntoch. Ça a été la révélation ! Depuis je suis avide de lectures de l'imaginaire et plus particulièrement de fantasy qui constitue l'essentiel de ma PAL.

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